La flûtiste Sarah Ouakrat et « LE NOUVEAU SALON »

LE NOUVEAU SALON, un « voyage musical » inspiré par Proust et proposé par la flûtiste Sarah Ouakrat

Uilenburgersjoel, ancienne synagogue d’Amsterdam construite en 1766 et aujourd’hui transformée en centre culturel, accueillera, dans sa salle de concert, la flûtiste Sarah Ouakrat accompagnée de quatre excellents musiciens pour un « Voyage musical d’exception », le mercredi 29 mars à Amsterdam, à 20 heures, à l’occasion du lancement de son disque « LE NOUVEAU SALON ».

Déterminée, charmeuse et passionnée, Sarah m’a confié le pourquoi et le comment de l’aventure audacieuse et personnelle dans laquelle elle s’est lancée : la gestation de ce défi que représente la fabrication de son premier disque.

Ce fut pour elle un travail intense et sur la durée. Elle a pensé le tout, élaborant le projet à partir d’une idée originale. Elle a pensé chaque étape et a su trouver les bonnes personnes pour l’accompagner sur le plan artistique, dans le choix des morceaux, le choix des artistes avec lesquels collaborer, les arrangements musicaux, l’écriture du livret et le dessin de la pochette …, sur le plan technique, avec les répétitions, les salles de concert pour les try out et le concert de lancement, le choix de l’ingénieur du son et de la salle pour l’enregistrement ; sur le plan de la communication, il lui a fallu trouver des soutiens financiers, le choix du label et des moyens de diffusion (photos, videos, videoclip), les concerts. L’enregistrement qui a pris toute une semaine en novembre dernier a été une fête et un défi et il lui a fallu ensuite passer plusieurs jours en studio pour choisir quelle version retenir pour l’édition finale.

  • C’est votre premier CD. En quoi est-ce une activité nouvelle dans votre carrière d’artiste ?

Sarah : « L’invention et la réalisation de ce projet est en effet quelque chose de nouveau dans mon parcours de flutiste professionnelle.

Depuis l’âge de onze ans et mon entrée au collège ‘études-musique’ à Paris, j’ai suivi avec succès un tracé qui m’a conduit au Conservatoire, à Paris, Lyon puis Londres. Lauréate de divers concours en France, en Écosse, en Russie, j’ai très vite été invitée à faire partie d’orchestres de chambre et d’orchestres symphoniques réputés, dans bon nombre de pays européens. Artiste invitée il me suffisait jusqu’ici d’accepter ou de refuser de jouer ce que l’on me proposait, en solo ou en orchestre, de donner une masterclass etc. Et depuis 2010, Première flûte solo du Balletorkest, orchestre des ballets néerlandais à l’Opéra d’Amsterdam, j’accompagne tant Het Nationale Ballet (Amsterdam) que le Nederlands Dans Theater (La Haye), dans un répertoire fantastique mais que je ne choisis pas.

Les deux années de contrainte sociale liée à la gestion de la crise Covid nous ont, nous les musiciens, isolés et privés de notre public, les concerts étant annulés et les salles fermées au public. Or, la musique c’est donner et partager des émotions, ensemble.

Cette période m’incitant à réfléchir sur mon parcours de musicienne, j’ai choisi de créer, inversant la demande, me tournant vers moi pour donner du nouveau à partir de mon patrimoine artistique. J’ai voulu revisiter ma mémoire sensorielle alliant divers arts : littérature, musique, danse, chant … et je me suis lancée pour une nouvelle naissance, sortant de ma zone de confort et m’exposant dans cette création d’un CD qui inscrit dans la pérennité la construction musicale inventée en un moment donné. D’interprète je suis devenue créatrice. »

  • Pendant cette période d’isolement, vous avez relu l’œuvre de Proust et vous avez choisi pour titre de votre expérience de création artistique : « Le nouveau Salon », en référence aux salons littéraires parisiens qui, du temps de Proust, voient se rencontrer écrivains, musiciens, peintres, danseurs (les Ballets russes).

Sarah : « Inspiré par À la recherche du temps perdu, ce projet s’imprègne de l’esprit et de la sensibilité de l’écrivain Marcel Proust. Cet enregistrement représente mon parcours personnel et musical de flutiste française expatriée, au travers de chefs d’œuvres du répertoire de la flûte, retravaillés à ma façon. »

  • Les quatre œuvres de Schubert, Ravel, Debussy et Prokofiev que vous avez choisies de jouer selon un arrangement de votre main sont des pièces très connues et que vous avez travaillées tout au long de vos études et de votre carrière jusqu’à maintenant.

Sarah : « Oui, je les ai présentées comme pièce de fin d’étude et pour les concours. Je les ai toujours jouées. Et c’est très audacieux de vouloir les revisiter, les arranger, leur donnant une existence nouvelle dans une autre formation (transformation de duo en trio, de l’instrument), ajoutant une nouvelle source (la voix), composant des transitions ; c’est là toute ma démarche personnelle et le résultat d’une recherche approfondie sur chaque pièce. »

Proust aimait la musique de Debussy et a pu rencontrer Prokofiev dans le Salon de la princesse de Polignac qu’ils fréquentaient tous deux. La composition des nouveaux arrangements est variée : voix (tenor), flûte et piano pour Schubert, flûte et piano pour Ravel, poème et flûte pour Syrinx de Debussy, nouveau trio pour flûte, piano et violon pour la sonate numéro 2 de Prokofiev.

  • Vous avez beaucoup voyagé et goûté à la diversité culturelle depuis vos études et vous avez choisi d’être Française aux Pays-Bas, vivant dans d’autres langues que votre langue maternelle.

Sarah : « J’ai beaucoup travaillé en Suisse et en Belgique, pays francophones mais après plus de dix ans de vie aux Pays-Bas, ces deux années de vie contrainte m’ont fait prendre conscience de deux nécessités ; aussi je me suis consacrée à l’étude du néerlandais d’une part, et d’autre part, je cherche à développer mes contacts avec la France –  pour faire partager ma création à un public français via radios et concerts, et avec la communauté française aux Pays-Bas – par le biais de l’Institut français par exemple. »

  • De quoi sera fait demain ?

Sarah : « De la vie, d’une ouverture sur un autre public, sur une nouvelle expression artistique combinant divers arts, intégrant et associant le classique à un autre monde.

Avec la création de ce CD j’ai tourné en vie ce que l’on nous présentait comme source d’angoisse, la peur et la mort, individuelle et sociale, associée au virus.

Je fais aussi partie de Pynarello, un collectif de rebelles, sans chef d’orchestre et sans partition, qui fête ses cinq ans d’existence aux Pays-Bas. Ces fous de musique classique revisitent les œuvres en les libérant des traditions qui les contraignaient ; je jouerais avec eux en mai et juin prochain la symphonie numéro 9 de Chostakovitch dans des villes de province néerlandaises, à Tilburg, Eindhoven, Heerlen, Nijmegen, Utrecht. »

Je parlais d’une aventure audacieuse, j’ajouterais que Sarah a de l’ambition, celle de donner à sa création audience et reconnaissance, au-delà des frontières.

Et, déjà … Le Cercle des Artistes Européens. L’art au service de la paix ! dont Sarah est partenaire « dans l’art et la culture » organise une exposition sur le thème du nouveau salon artistique proustien pour aider « à promouvoir ce beau projet musical et humain ».

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